Cannibales !
“Tupi or not Tupi : that is the question.”
C’est la question que pose le poète brésilien Oswald de Andrade au début des années 1920 dans son Manifeste Antropophage. C’est à la fois une célébration des Indiens Tupi-Guarani du Brésil, qui pratiquaient certaines formes de cannibalisme rituel, notamment celle de manger les guerriers ennemis faits prisonniers. En ce sens, c’était un sort honorifique, préférable à celui d’être un prisonnier corvéable.
C’est aussi une célébration des cultures du “Nouveau Monde” et des mondes nouveaux, qui dévorent et ingèrent les anciens particularismes pour en faire quelque chose de neuf et d’unique. Cette question, littéralement, c’est Tupi qui mange Shakespeare.
« Bambous, nous décrétons la mort à la littérature doudou. Et zut à l’hibiscus, à la frangipane, aux bougainvilliers. La poésie martiniquaise sera cannibale ou ne sera pas. »
C’est ainsi que l’étoile étouffée Suzanne Roussi-Césaire finit un de ses essais de la revue Tropiques dans les années 1940. Elle y signale la fin de la récré. De la poésie lyrique du lover romantique de bas-étage qui prend l’inspiration face à la mer des îles. Elle y revendique aussi le surréalisme, non pas par imitation, mais parce que le surréalisme est antillais.
Suivant l’injonction de nos glorieux Anciens, c’est par une nouvelle série de Kenny Ozier-Lafontaine que nous commençons ce deuxième mois de ZIST, la bien nommée Mange Homme. Simone Lagrand nous croque un nouveau portrait avec Patrick, et Tinderbelle, la mangeuse d’hommes, nous décline son menu, jusqu’à l’indigestion.
Zaka