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Les États-Unis responsables du trafic d’armes dans les Antilles françaises ?

La Martinique et la Guadeloupe ont un problème d’armes à feu, en témoignent les infractions, meurtres, et tentatives de meurtres régulières sur les deux îles. Cette problématique est liée de près au trafic de drogue dans la région, qui nourrit le commerce illégal d’armes à feu. Si ce dernier semble n’avoir pris de l’ampleur en Martinique et en Guadeloupe que ces dernières années, les pays de la Caraïbe sont aux prises avec l’afflux illégal de ces armes depuis des décennies. Une partie significative de ces armes viennent des États-Unis. Le pays, où le port d’armes est consacré par le second amendement, et où les lobbys des armes à feu ont une influence politique majeure, fait également face à un fort taux de violence armée, illustré par la forte récurrence des fusillades de masse, meurtres, et accidents domestiques impliquant des armes à feu.

En un mot, le problème des armes à feu aux États-Unis alimente également un problème régional de trafic illégal, qui aujourd’hui touche de plein fouet la Martinique et la Guadeloupe, dans un contexte socio-économique tendu. Dans ces deux territoires, la réponse de l’État français pour tenter d’endiguer cette problématique est avant tout sécuritaire. Cependant, pour une solution efficace et durable, il est primordial que la France développe une stratégie politique et diplomatique vis-à-vis des États-Unis et utilise son statut d’allié, et le poids diplomatique de l’Union Européenne (UE), afin de pousser cette puissance régionale à endiguer le trafic émanant de son territoire. Ces efforts doivent se faire en coopération avec les États caribéens, qui depuis des années collaborent avec l’administration américaine en ce sens. En parallèle, sur le plan de la politique intérieure, il est urgent pour le gouvernement français et les élus locaux de développer une politique économique et sociale adaptée pour trouver des solutions aux facteurs d’incitation à la délinquance et la violence en Martinique et en Guadeloupe.

Les Caraïbes françaises, grandes déconnectées de la région

Il ne fait aucun doute que les États-Unis sont une source majeure d’armes à feu illicites dans les Caraïbes, et probablement la plus grande source dans certains États et territoires.

Source : Small Arms Survey et la Communauté des Caraïbes (CARICOM)

En avril 2023, le Small Arms Survey et l’Agence de Mise en Œuvre pour la Criminalité et la Sécurité de la Communauté Caribéenne (CARICOM IMPACS) ont publié un rapport alarmant qui révélait que “plus de la moitié des homicides commis dans la région des Caraïbes impliquent l’utilisation d’une arme à feu”. Le rapport concluait également qu’il ne fait aucun doute que les États-Unis sont une source majeure d’armes à feu illicites dans les Caraïbes, et probablement la plus grande source dans certains États et territoires de cette région. En novembre 2024, le Government Accountability Office des États-Unis a publié un nouveau rapport affirmant que 73% des armes impliquées dans des crimes dans la Caraïbe et soumises à analyse venaient des États-Unis.

Le trafic d’armes a des conséquences désastreuses sur la sécurité nationale des pays caribéens. Par exemple, en Haïti, qui est aux prises avec une crise sécuritaire majeure, plus de 80 % des armes saisies sont importées ou fabriquées aux États-Unis, et sont utilisées par les gangs contre la police nationale. En mars 2024, la députée américaine Sheila Cherfilus-McCormick, qui  a qualifié le problème des armes de menace pour la sécurité et la stabilité régionales, a introduit au Congrès américain avec les sénateurs Chris Murphy et Tim Kaine, et le député Joaquin Castro, un projet de loiCaribbean Arms Trafficking Causes Harm Act, ou CATCH― visant à freiner le trafic illégal d’armes des États-Unis vers les Caraïbes.

Mais le débat sur le trafic illégal d’armes à feu entre les États-Unis et les Caraïbes se concentre sur les États insulaires indépendants. Par conséquent, la Martinique et la Guadeloupe, les deux îles françaises de la région, ne sont ni incluses dans les analyses, ni dans les discussions entre les pays caribéens et les États-Unis. Du point de vue français, il s’agit d’une opportunité manquée afin de coopérer avec le reste de la région pour trouver des solutions durables aux violences armées en Martinique et en Guadeloupe, et lancer un signal fort aux populations de ces territoires et démontrer la détermination de l’État à faire de ce challenge une priorité nationale. Du point de vue des États indépendants des Caraïbes, il serait stratégique de poursuivre un partenariat politique avec la France et l’UE pour pousser Washington à prendre davantage de mesures pour freiner ce trafic.

Un contexte sécuritaire alarmant dans les Caraïbes françaises

la Martinique et la Guadeloupe, les deux îles françaises de la région, ne sont ni inclues dans les analyses, ni dans les discussions entre les pays caribéens et les États-Unis

Bien que le manque de données publiques rende difficile de le déterminer avec précision, des éléments anecdotiques suggèrent que la période de la COVID-19 en Martinique et Guadeloupe a été accompagnée d’une forte augmentation de la violence impliquant l’utilisation d’armes à feu. En janvier 2024, un rapport alarmant du Ministère l’Intérieur et des Outre-mer classait la Guadeloupe et la Martinique aux deuxième et troisième rangs nationaux, derrière la Guyane française, en termes de nombre d’homicides pour 100 000 habitants—9,4 en Guadeloupe et 6,9 en Martinique, contre 1,3 en France continentale. Les autorités locales ont indiqué qu’en 2023, 50% des homicides en Guadeloupe ont été commis avec une arme à feu, et que celles-ci étaient responsables d’un tiers des homicides en Martinique. Bien que ces chiffres ne semblent pas choquants comparés à ceux de pays aux lois permissives sur les armes à feu, comme les États-Unis, ils sont extrêmement élevés pour un pays comme la France, où il n’existe pas de droit de porter des armes à feu, comme le souligne la disparité entre les îles des Caraïbes et la France continentale.

En Guadeloupe et en Martinique, les armes à feu illégales sont utilisées pour toutes sortes de délits, du vol à l’agression, en passant par les violences intrafamiliales, les délits liés au trafic de drogue et les violences contre les forces de l’ordre. Ces dernières ont été mises en évidence ces derniers mois en Martinique, en marge d’un mouvement social de protestation contre le coût élevé de la vie. En décembre  2019, Clarisse Taron, la procureure de la République en Martinique, a dénoncé ce qu’elle a qualifié de normalisation de la possession d’armes à feu illégales sur l’île malgré une réglementation stricte en vigueur pour leur achat et l’absence de fabrication locale. Elle a noté que les saisies d’armes par la police sont désormais quasi quotidiennes, avec 1 254 armes saisies depuis juin 2023, soit une pour 260 habitants de l’île. En septembre 2024, elle annonçait plus de 300 infractions impliquant des armes à feu depuis le début de l’année―soit plus d’une infraction par jour, en moyenne. En novembre 2024, la Martinique enregistrait 23 homicides―contre 25 en 2023―dont 16 par armes à feu, dont l’un des plus récents a coûté la vie à deux jeunes, dont un mineur.

La circulation des armes à feu en Martinique et en Guadeloupe—armes de poing mais aussi armes de guerre, comme les fusils d’assaut—est alimentée par le trafic de drogue à destination de l’Europe, en hausse à cause du passage des États-Unis aux drogues de synthèse. Des données permettant une analyse continue de ces tendances sont essentielles pour comprendre les flux de drogue et des armes, et adapter les solutions sécuritaires, politiques, et sociales. Cependant, seules les armes judiciarisées sont analysées, et il n’y a à date aucune stratégie d’intégration de ces données dans la lutte contre le trafic d’armes.

 Il n’existe donc pas de politique d’analyse systématique des armes saisies pour retracer leur origine et lieu de fabrication des armes et leur parcours jusqu’aux îles françaises. Il n’existe pas non plus de données publiques sur les tendances des trafics d’armes et de drogue au cours des dernières années, ni sur l’impact des mesures prises par l’État français pour lutter contre ces deux phénomènes.

Les données publiques disponibles―relativement limitées―montrent que les autorités ont adopté une approche sécuritaire, notamment en renforçant la sécurité aux frontières aériennes et maritimes et la coordination avec  les îles voisines et en augmentant les patrouilles de police et les points de contrôle sur terre. Si elles sont nécessaires, ces mesures demeurent néanmoins insuffisantes, en témoigne l’augmentation du nombre d’armes à feu illégales présentes dans les deux îles.

L’implication de la France dans la stratégie régionale de coopération avec les États-Unis

Il n’existe donc pas de politique d’analyse systématique des armes saisies pour retracer leur origine et lieu de fabrication des armes et leur parcours jusqu’aux îles françaises. Il n’existe pas non plus de données publiques sur les tendances du trafic d’armes et de drogue au cours des dernières années, ni sur l’impact des mesures prises par l’État français pour lutter contre ces deux phénomènes.

La crise du trafic illégal d’armes exacerbe les crises sociales, économiques et politiques auxquelles la Martinique et la Guadeloupe sont confrontées, et qui se combinent pour alimenter un sentiment anti-français croissant au sein d’une partie de leurs populations. L’insécurité affecte négativement les perspectives de développement économique, qui sont déjà au plus bas. Ces dernières semaines, plusieurs assureurs majeurs ont annoncé ne plus couvrir le risque “émeutes” pour les entreprises en Martinique et en Guadeloupe suite aux exactions commises par des acteurs violents en marge du mouvement contre la vie chère. Par ailleurs, dans un contexte de fuite massive des jeunes et des cerveaux―les étudiants quittant massivement les îles pour poursuivre des études universitaires en France continentale―la double crise sécuritaire et économique décourage également les jeunes travailleurs qualifiés de revenir. Enfin, l’utilisation croissante des armes à feu dans les violences contre les forces de sécurité et leur exposition en plein jour par des civils dans des lieux urbains et dans des vidéos partagées sur les réseaux sociaux, démontrent également un sentiment d’impunité parmi les acteurs violents, la faiblesse des institutions étatiques pour les dissuader et une crise plus large de leur légitimité.

En résumé, ces dernières années, une “tempête parfaite” s’est lentement formée dans les Antilles françaises. L’État français a depuis des décennies―et sans nulle doute depuis le processus de départementalisation des années 50―échoué à élaborer une stratégie de développement durable et innovante pour ses régions d’outre-mer; la Guyane, Mayotte et la Nouvelle-Calédonie, faisant elles aussi face à des crises multiformes. Ces faiblesses témoignent un manque d’attention envers ces régions, trop souvent perçues par Paris comme des régions lointaines et peu prioritaires. Mais pour les citoyens de ces territoires, il s’agit d’une question existentielle de dignité et de droit au développement et à la sécurité.

Les autorités françaises reconnaissent leur incapacité à enrayer le flux d’armes illégales et identifient les États-Unis comme la principale source du problème, confirmant ainsi les lacunes d’une approche fragmentaire centrée sur la sécurité. Au contraire, il est nécessaire d’établir une stratégie holistique― politique, sécuritaire, économique, et judiciaire―couvrant les niveaux local, national et régional pour lutter contre le trafic d’armes illégales. En ce sens, Paris devrait considérer la coopération politique avec les pays de la Caraïbe et les États-Unis comme une priorité de sécurité nationale, et non pas considérer cette problématique comme mineure, géographiquement lointaine, et subordonnée aux questions de politique étrangère.


Une menace pour la sécurité nationale de la France

En effet, l’État français doit développer une stratégie d’engagement politique avec les États-Unis, source principale du trafic des armes à feu.

Au niveau régional, les États-Unis et des États des Caraïbes coopèrent déjà pour lutter contre le trafic, que ce soit par l’intermédiaire de la CARICOM ou de l’Organisation des États Américains. Le Département de la Justice américain dispose d’un coordinateur pour les poursuites en matière d’armes à feu dans les Caraïbes, et la loi CATCH fournirait au Congrès américain un outil pour surveiller le travail de ce bureau par le biais d’un rapport annuel sur ses activités. Mais il reste beaucoup à faire pour trouver une solution pérenne au flux incontrôlé d’armes.

Aux États-Unis, cela doit commencer par le fait de reconnaître l’impact désastreux des flux d’armes incontrôlés―qu’il s’agisse du trafic illégal d’armes ou des exportations légales―non seulement en favorisant la violence sur le sol américain, mais aussi en alimentant l’instabilité dans le monde entier.

Mais dans un contexte où les pays du Sud global luttent pour faire avancer la transformation de l’ordre mondial afin de le rendre plus équitable et adapté à leurs intérêts, les petits pays des Caraïbes pèsent relativement peu face à leur puissant voisin. Malgré une coopération de long terme entre ces États et les États-Unis, Washington peine à prendre des mesures plus audacieuses pour contrôler son marché des armes à feu.

Recontextualiser la question du trafic d’armes en incluant la Guadeloupe et la Martinique est une première étape. Les territoires français des Caraïbes ne sont pas inclus dans les données caribéennes en raison de leur statut de régions françaises. Cette approche est à courte vue, car ces îles sont confrontées à des défis similaires à ceux de leurs voisins. Au cours des dernières années, des efforts ont été déployés pour intégrer les deux îles, ainsi que la Guyane française en Amérique du Sud, à la CARICOM en tant que membres associés. Si cette adhésion est accordée, elle pourrait jeter les bases d’une coopération et d’un soutien renforcés de l’État français aux efforts des pays des Caraïbes pour lutter contre le trafic illégal d’armes à feu. Cela nécessiterait, bien sûr, une stratégie et un plan d’exécution adaptés.

Il est temps pour la France, qui fait souvent des déclarations audacieuses sur ses aspirations à être un leader mondial et un partenaire des pays du Sud global, de prendre des actions concrètes. Cela est d’autant plus critique que la Martinique vit depuis plusieurs mois une crise sécuritaire majeure sur fonds de griefs socio-économiques.

Par ailleurs, la Martinique et la Guadeloupe étant des régions ultrapériphériques de l’UE, ces deux îles sont concernées par les stratégies de l’UE en matière de lutte contre les trafics illégaux de drogue et d’armes. Les élus locaux devraient donc s’appuyer sur les plans d’action existants pour exiger plus du gouvernement français pour aider ces régions face au crime organisé, et notamment pour renforcer la pression exercée auprès des États-Unis. En ce sens, les deux îles ne peuvent être considérées par Paris comme des remparts protégeant la France et le reste de l’UE. Si cette prise de conscience a récemment eu lieu, les actions politiques restent limitées.

De leur côté, les pays des Caraïbes devraient également chercher à tirer parti de l’UE et de l’engagement affiché du président français Emmanuel Macron à être un partenaire fiable pour les pays du Sud afin d’obtenir le soutien de la France sur cette question. Pour la France, il s’agit d’une occasion gagnant-gagnant de démontrer qu’elle peut être un partenaire crédible pour les pays du Sud, tout en s’occupant de son propre Sud “intérieur”―ses territoires d’outre-mer, qu’elle a trop longtemps négligés.

Les États-Unis, quant à eux, ont le devoir et la responsabilité de s’attaquer au problème des armes à feu, afin de protéger leur propre population au niveau national et d’éviter de déstabiliser davantage leur environnement immédiat.

Tout cela ne peut se faire que par le biais d’une coordination diplomatique et politique et des stratégies intégrées. Il est temps pour la France, qui fait souvent des déclarations audacieuses sur ses aspirations à être un leader mondial et un partenaire des pays du Sud global, de prendre des actions concrètes. Cela est d’autant plus critique que la Martinique vit depuis plusieurs mois une crise sécuritaire majeure sur fonds de griefs socio-économiques.

La responsabilité de l’État et des élus locaux

Au niveau national, en plus de continuer à renforcer la sécurité aux frontières, le gouvernement français devrait investir dans la collecte et l’analyse systématiques des données de traçage des armes à feu illégales. Par ailleurs, il n’existe pas de laboratoire d’analyse dans la région, et les armes doivent être envoyées en France continentale pour analyse―un processus coûteux et long. Pour permettre plus d’efficacité, le gouvernement français pourrait créer un laboratoire d’analyse des armes à feu dans les Caraïbes françaises afin de garantir des analyses rapides et rentables.

Par ailleurs, une fois les données sur le traçage des armes à feu disponibles, il sera important de partager publiquement les analyses avec les populations locales pour démontrer l’engagement du gouvernement à lutter contre l’insécurité et à réduire le sentiment d’impunité chez les acteurs violents. Les rapports publics, tels que ceux réalisés par le Small Arms Survey, sont un moyen d’assurer une plus grande transparence. La France doit faire de même pour ses régions. Ces données doivent également être communiquées aux acteurs politiques locaux, la société civile, le système judiciaire et les différentes institutions de sécurité, afin de promouvoir une réponse intégrée au problème. 

En 2013, 2019 et 2023, les députés représentant la Martinique et la Guadeloupe ont proposé à l’Assemblée Nationale la création d’une commission d’enquête sur le trafic des armes à feu dans les deux îles. A chaque fois, l’initiative a échoué. L’absence d’une telle commission est une erreur, car l’analyse de l’origine, du trajet et de l’utilisation de ces armes à feu au fil des ans, en corrélation avec des données sur le trafic de drogue, est essentielle pour une réponse coordonnée à l’échelle régionale. Les élus locaux devraient créer une coalition plus large et plus forte afin d’exercer plus de pression au sein de l’Assemblée Nationale et obtenir une commission d’enquête. De même, il est capital que ces initiatives soient relayées auprès des populations locales afin que la société civile puisse, elle aussi, exercer son rôle et appuyer et suivre l’évolution de cette demande.

Enfin, compte tenu de la situation sécuritaire, économique, et politique tendue en Martinique ces derniers mois, les acteurs locaux politiques, médiatiques, et de la société civile, ont une responsabilité majeure dans le partage d’un message clair vis-à-vis des violences avec armes à feu, et du lien de ces armes avec les trafic d’armes et de drogue. Par exemple, le mouvement contre la vie chère ces derniers mois a été émaillé de nombreuses exactions commises avec des armes à feu. Ceci combiné au profil du leader de l’association à l’origine du mouvement – condamné quatre fois pour trafic de drogue et d’armes, vol, et violence – et la circulation d’une vidéo de lui accueilli dans le quartier foyalais de Sainte-Thérèse, le principal lieu des violences, par des tirs d’armes à feu, suscitent de nombreux questionnements.

Au vu de la désinformation et mésinformation prégnantes autour du mouvement social, il apparaît nécessaire pour les acteurs locaux de sensibiliser les populations aux risques du développement de dynamiques de narcopolitique, et de déconstruire systématiquement toute instrumentalisation des revendications sociales légitimes par des acteurs des trafics de drogue et d’armes à feu. Les manquements à date à ce niveau participent à la détérioration rapide de la situation économique, sécuritaire, sociale, et politique en Martinique, et renforcent l’incapacité de l’État à apporter des solutions efficaces et pérennes.

Les élus locaux devraient créer une coalition plus large et plus forte afin d’exercer plus de pression au sein de l’Assemblée Nationale et obtenir une commission d’enquête. De même, il est capital que ces initiatives soient relayées auprès des populations locales afin que la société civile puisse, elle aussi, exercer son rôle et appuyer et suivre l’évolution de cette demande.

En conclusion, la crise des armes à feu illégales en Martinique et en Guadeloupe ne pourra être résolue sans une approche multidimensionnelle incluant une stratégie politique de coopération avec les États-Unis, en collaboration avec les États caribéens et les organisations régionales telles que la CARICOM. A quelques semaines de la prise de fonction du président Donald Trump, et alors que le gouvernement Barnier vient d’être dissous, les élus des deux îles devraient se concerter pour préparer une approche conjointe vis-à-vis du prochain Ministre des Outre-Mers et renouveler leur demande de commission d’enquête à l’Assemblée Nationale. De son côté, le prochain gouvernement devrait prendre la pleine mesure des dangers de la détérioration du contexte sécuritaire et socio-économique des îles françaises des Caraïbes, et leur donner la priorité qu’elles méritent en considérant l’impact du trafic venant des États-Unis comme une menace à la sécurité nationale de la France. En absence de cette prise de conscience, l’on ne peut que s’attendre à ce que la situation continue de se dégrader, notamment en Martinique, où les prémisses de la narcopolitique sont déjà visibles.

Cet article a été adapté à partir d’un article initialement publié par World Politics Review.