De porte close en porte close. Itinéraire du photographe d’un bord à l’autre du regard.
Il y a des portes qui sont fermées, et chaque humain en cherche les clés.
C’est avec ces mots de Christian Boltanski que la découverte de la série de photographies “Non-Lieux”, de Dan Beal, devrait commencer. Ou finir.
L’idée première tient d’un paradoxe absurde : le non-lieu n’existe pas et, pourtant, il représente quelque-chose. Il est un espace devant lequel ou dans lequel on passe, sans s’attarder, sans prêter attention ; un espace que l’on fuit ; un espace qui a perdu de son essence ou de son principe – un espace en négatif, en quelque sorte.
Dan Beal nous propose une déambulation de portes closes en portes closes, un parcours tout au long de, comme il le dit lui- même, “la richesse étrange des centres-bourgs” de la Martinique.
Le négatif, il le travaille au sortir de son argentique datant des années 80. Et parfois, sur une seule pellicule, il imprime deux clichés.
Il lui faut travailler la composition de tête et suivre un procédé de standardisation de la photographie, mais sans trop calculer, parfois des erreurs heureuses apparaissent. Surgit alors l’imprévisible.
Dan Beal surimpose les matières et les âges des portes qu’il rencontre lors de ses errances artistiques. Une manière, nous dit-il, de se réappropprier l’environnement urbain de l’île. Une manière, sûrement, d’en faire aussi jaillir autre chose, un mystère qu’on ne pourrait percevoir sans s’être arrêté. Un mystère, ou bien une clé.
Rien de plus assourdissant que le silence de ces façades aux bouches fermées, incapables de raconter par elles-mêmes la moindre bribe de leur histoire […]”
Véronique Réunif